Sans détour, la propriétaire avait restr Sans détour, la propriétaire avait restreint les accès
Chaque propriétaire riverain peut seul interdire l’accès d’un chemin d’exploitation aux non-riverains.
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L’histoire
Christine était propriétaire d’une belle parcelle, ensoleillée et calme, desservie par un chemin d’exploitation. Elle y avait fait construire un mas en vue d’y couler ses jours de retraite. Mais le chemin était fréquemment utilisé. La laiterie Pot-au-lait l’utilisait comme raccourci pour rejoindre son usine d’embouteillage. Des voisins étaient autorisés, par l’association syndicale, à l’emprunter pour se rendre au village alors qu’ils n’étaient pas riverains. Excédée par ces passages intempestifs, Christine avait assigné la société et l’association en interdiction d’accès au chemin par les non-riverains.
Le contentieux
Christine s’était renseignée auprès du syndicat de la propriété rurale. Elle considérait avoir le droit pour elle. En effet, l’article L. 162-1 du code rural dispose que « les chemins et sentiers d’exploitation sont ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation. Ils sont, en l’absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi, mais l’usage en est commun à tous les intéressés. L’usage de ces chemins peut être interdit au public. » Le droit d’usage d’un chemin d’exploitation ne peut donc bénéficier à des parcelles non limitrophes, ni a fortiori au public. Aussi, en l’absence de décision collective d’ouverture au public, ni la société Pot-au-lait, ni les voisins, qui n’étaient pas riverains du chemin en litige, ne pouvaient l’utiliser, même s’il constituait un raccourci.
La société Pot-au-lait avait pourtant sorti la grosse artillerie juridique. L’action de Christine était irrecevable selon elle. Si les riverains d’un chemin d’exploitation bénéficient d’un droit d’usage légal, et de l’usus du droit de propriété, les non-riverains bénéficient, de leur côté, d’un droit de co-usage indivis sur le chemin, en cas de pluralité de fonds traversés, sauf interdiction au public. Il fallait donc appliquer la règle de la majorité des deux-tiers des indivisaires pour toute action concernant la gestion des biens indivis. Comme Christine ne détenait pas cette majorité, son action était irrecevable.
Les juges avaient donné raison à la laiterie sur le fondement de l’article 815-3 du code civil. Ce texte précise que les actes d’administration relatifs aux biens indivis requièrent une majorité d’au moins deux tiers des indivisaires. Aussi, puisqu’elle ne contestait pas disposer d’une telle majorité, Christine n’avait pas qualité à agir aux fins d’interdire l’accès au chemin aux non-riverains.
Mais la Cour de cassation, saisie du pourvoi de Christine, a annulé cette solution, qui méconnaissait l’article L. 162- 1 du code rural. L’usage commun des chemins d’exploitation n’est pas régi par les règles de l’indivision et chaque propriétaire riverain dispose d’un droit d’en interdire l’accès aux non-riverains.
L’épilogue
Christine pourra donc obtenir de la cour de renvoi qu’elle l’autorise à établir des obstacles condamnant l’accès au chemin d’exploitation desservant son mas, et à en interdire l’accès aux non-riverains. Pour autant, s’il peut agir seul afin de faire respecter le caractère privatif d’un chemin d’exploitation, le propriétaire ne doit pas agir dans des conditions si excessives qu’elles relèveraient de l’abus de son droit de propriété.
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